Quel nom pour l'utilisateur
Après Don Norman, Jack Dorsey et bien d’autres, c’est au tour de la directrice du design de produit chez Facebook de déclarer qu’elle préfère ne pas dire « utilisateur » mais tout simplement « personne ». L’idée derrière ce refus est toujours de rappeler que les utilisateurs sont des êtres humains et ne se résument pas à leur utilisation d’un service. C’est très bien que des compagnies mettent en avant une démarche centrée sur l’utilisateur, pourtant je trouve la démarche malavisée. (Sans parler de l’ironie à voir Facebook donner des leçons de respect.)
Prendre conscience que les utilisateurs sont des créatures complexes, c’est très bien mais c’est seulement le point de départ de toute approche ergonomique et ne doit pas se faire au prix d’un appauvrissement de notre vocabulaire. Au lieu de tout réduire à une notion aussi générique que « les gens », il faut au contraire affiner notre segmentation. Par exemple, des utilisateurs professionnels, amateurs ou grand public n’ont pas les mêmes attentes et comportement. Parmi le grand public, un abonné n’est pas la même chose qu’un acheteur, qui n’est pas la même chose qu’un crowdsourcer, qui n’est pas la même chose qu’un fan de la première heure, etc. Il y a ainsi plein de typologies et de classifications à trouver (prélude au recours à des personas spécifiques à un projet).
Par ailleurs, ce terme a une raison historique : l’utilisateur est quelqu’un qui utilise la machine pour son propre compte, contrairement à l’opérateur ou à l’ingénieur. C’est aussi forcément un individu, contrairement au client qui peut être une organisation. La figure de l’entrepreneur en constituait l’archétype d’origine. Grâce à la micro-informatique naissante, il faisait ses comptes ou des prévisions sans demander de l’aide au département de traitement des données (cf cet article passionnant). Le terme est sans doute insuffisant pour décrire l’ubiquité croissante de l’informatique, mais ce n’est pas en parlant de « personnes » qu’on comprendra mieux cette évolution.